it's a shame we're not soulmates ✧ Céleste ✧

Aros t’a donné un joli nom, Céleste
et joliment approprié

Un ciel sans nuages, plein d’étoiles scintillantes, toujours un sourire aux lèvres. Une douce brise qui nous caresse la joue puis disparait dès qu’on rouvre les yeux. Pour la plupart, c’est tout ce que tu es. (tout ce que tu veux bien être) Une présence agréable qui file sans laisser le temps de la retenir, et emporte parfois un peu de nous avec elle. C’est facile de s’attacher, avec tes mots doux et gestes délicats.

avec ton éternelle bonne humeur, tes compliments faciles et ton rire aérien
avec tes petites attentions et tes marques d’affection en coup de vent

avec cette façon que tu as de rendre un rien spécial
avec ce sourire malicieux allumant des étoiles dans tes yeux

et toutes tes demi-vérités
(tous tes demi-mensonges)

Tu n’es pas hypocrite, Céleste, et ce que tu montres n’est pas faux, mais c’est incomplet. C’est comme regarder le ciel à travers la fenêtre: on ne voit qu’une partie. La partie que tu veux bien montrer. Celle sans les nuages gris et les vents glacés. Celle sans l’orage de toute cette haine contenue, ces ressentiments amers, tout un tas de remords et cette peur corrosive que tu nieras connaitre.

Et c’est facile d’y croire quand on t’a vu courir sur les toits, flirtant avec le danger come tu flirtes avec des inconnu.es, pas un semblant de peur sur le visage. L’adrénaline est grisante, l’appel du vide une délicieuse tentation. Mais sans cette effarante audace et cette facilité à prendre des décisions sur le vif, tu ne serais sans doute plus de ce monde. On dira que tu as de la chance, et ce n’est pas faux.. mais ce n’est pas tout.

(sinon, on t’aurait déjà capturé)
(et mutilé tes jolies ailes pour te clouer au sol)

C’est moins facile d’y croire quand la brise devient une bourrasque qui fait sèchement claquer les volets et les portes sur son passage. Tes sarcasmes sont surprenants et ton cynisme glaçant. Comme les sinistres ululements du vent dans les arbres, ça donne des frissons. Quelques secondes passent et ton sourire chaleureux semble nier ce qui est arrivé. Mais Céleste, au fond de tes yeux clairs, il reste un froid qui ne laisse pas de place au doute.

c’est comme si tu nous gardais dans l’oeil du cyclone
jusqu’à ce qu’on s'aventure un peu trop loin du centre

Quand on pose trop de questions tu es évasif, Céleste, un courant d’air qui nous file entre les doigts. Tu souris sans que le coeur y soit, donnant un prétexte ridicule pour détourner la conversation et c’est assez lumineux pour masquer le grand vide. Ce tout ce qu’il y avait avant que tu sois ‘Céleste’, qui te manque souvent mais dont tu ne parles jamais. Il y a des choses qui ne regardent que toi, et depuis que ça t’en a coûté, tu sais garder ce qui te tient à coeur secret.

tu es une oreille attentive et une bonne épaule pour pleurer
mais tu es une nuit de grand vent: tu chasses tes nuages loin des regards curieux

Si on approche un trou noir, si une pluie d’astéroïdes menace, si la gravité se fait pesante, tu changes de cap en un instant et détournes l’attention avec des étoiles. Des étoiles filantes quand tu flirtes à tout va, des supernovas pour tes sourires et des naines rouges pour ton humour parfois déplorable. Tu ne te laisses pas abattre. Tu brilles et tu rayonnes, sans avoir besoin de personne pour allumer ta Lune. Depuis les toits, tu ris de beaucoup de choses qui ne devraient pas être drôles, et tu baignes les autres de ta lumière en leur laissant oublier que pour la produire, tu brûles.

quel curieux objet céleste
tu n’es pas un peu seul, là haut ?

« Je te manquerai ? » tu aurais préféré qu’il ne demande pas

A la lumière de la lune, les ombres qui jouent sur le visage de Micaiah le rendraient méconnaissable pour quelqu’un d’autre que toi. Mais tu le connais par coeur: tu le vois presque tous les jours depuis plus de 10 ans. Tu passes un main sur sa joue humide de gouttes salées, puis dans ses cheveux roux, ton sourire forcé incapable de tenir bien longtemps. Il rit en te voyant hocher la tête à défaut de pouvoir parler.

sans joie, tout en amertume
son expression se durcit

« Alors pourquoi tu pars ? » le ton est accusateur et des griffes acérées enserrent ton coeur

tu n’as pas envie de partir
mais tu ne comptes pas rester

Tu secoues la tête et ses mains se crispent sur tes épaules. Il te fait mal, il appuie sur tes bleus, mais tu ne bouges pas. Tu as essayé de rester, tu t’es dit que pour lui tu pouvais le supporter, tu t’es juré que tu n’étais pas un lâche. Mais la réalité n’a pas été douce avec tes braves résolutions. Ta lèvre est fendue, ta peau bleuie en plus d’endroits qu’il ne faudrait, et tu tiens à peine sur tes jambes. On jurerait qu’un simple coup de vent pourrait te renverser.

et peut-être que c’est le cas
ou peut-être qu’il te fera tomber avant

(ses yeux sont tellement sombres)
(et tellement tristes, à cause de toi)

Lorsque tu secoues encore la tête Micaiah soupire, relâchant sa prise. Bien sûr que tu pars, c’est égoïste de t’en vouloir. C’est égoïste de penser qu’il te retiendra, parce qu’à ta place, il partirait aussi. Il partirait avec toi, s’il ne devait pas s’occuper de sa famille, en toute honnêteté. Mais sans lui, ils ne s’en sortiraient pas, vous le savez tous les deux. Alors il te regarde le quitter, parce que toi, ta famille, tu t’en fiches. C’est bien à cause d’eux, que tu dois partir.

tu ne peux même pas rester à Kalos
il ne fait pas de doute que ton père te retrouverait

(et les conséquences promettent d’être mémorables)

y penser te met un gout métallique dans la bouche
ou peut-être que c’est le sang de ta lèvre fendue

Tu serres les dents en essayant d’oublier les cris, le tonnerre et la colère qui ont déferlé ce soir même. Comme le précédent. Et tout le mois d’avant, depuis ce matin où ton père vous a surpris l’un dans les bras de l’autres, ta main dans les cheveux de Micaiah et son visage trop proche du tien pour rester platonique. Il venait de t’embrasser, tes lèvres brûlaient encore un peu du contact des siennes, et tu étais trop perdu dans ses yeux bruns pour faire attention à quoi que ce soit d’autre. Son sourire valait de l’or, dans les rayons du levant qui tombaient à travers la fenêtre de ta chambre.

Jusqu’à ce qu’on t'agrippe par l’épaule pour te rappeler que ce que vous partagez n’est pas ‘normal'. Que tu es une honte en plus d’être inutile, que t’as jamais rien fait correctement et ça, c’est le pompom. Ton père a toujours été dur avec toi, parce que tu es le petit dernier qui n’a jamais compris les choses assez bien assez vite. Parce que tes aînés sont tellement mieux que toi, tellement plus concentrés sur leurs tâches, au lieu d’aller perdre leur temps à jouer.

sauf que vous avez 4 ans et 5 ans d'écart
forcément, ils sont plus matures que toi

Dès tes 8 ans, tu quittais la maison par la fenêtre de ta chambre, descendant le mur précautionneusement pour aller parcourir les rues d’Illumis à la nuit tombée. Souvent avec Micaiah, parce que tu avais un peu peur du noir et c’est toujours moins drôle d’explorer tout seul. A 12 ans tu préférais les toits, et si le convaincre a pris un moment, Micaiah a fini par t’y suivre, serrant fermement ta main à l’occasion parce que les hauteurs ne l’ont jamais mis à l’aise.

bien sûr, ces sorties t’étaient interdites
bien sûr, ça ne les rendait que plus amusantes

Quand ton père l’a appris, tu as eu des bourdonnements dans les oreilles toute la semaine suivante. Tu étais consigné à la maison toute la journée, aussi, et il a dû t’interdire de voir Micaiah parce qu’il avait une ‘mauvaise influence’ sur ton cas déjà désespéré, mais.. ça ne t’a pas arrêté. Il te faisait peut être peur, mais ta mère et tes deux aînés ne le laissaient jamais aller trop loin.

après qu’il t'aie surpris avec Micaiah, ils n’ont plus pipé mot
sans doute parce qu’ils sont de son avis

« Tu ne penses qu’à toi, Céleste. » son ton glacial te ramène à lui, et tu fronces les sourcils

ce n’est pas ton nom
et il ne t’a jamais dit ça

(ça n’aurait pas été juste)
(tu penses beaucoup à lui, aussi)

Il ne t’a jamais dit ça, mais ses mots te prennent à la gorge, s’infiltrent dans tes poumons, en chassant l’air avant même que ses doigts n'enserrent ton cou. Son visage se déforme maintenant, méconnaissable et loin, très loin de celui dont tu te souviens. Sa bouche s’élargit de façon grotesque, et des dents plus grandes que nécessaire brillent dans les rayons de la lune lorsqu’il se répète, amer. Il t’appelle encore Céleste et ses mots se font cruels, tranchants, leurs gouttes de poison brûlent ta peau et il resserre sa prise.

« Tu ne m’aimais même pas, je parie. » tu aimerais nier mais impossible de parler

tu respires à peine
il se met à rire

(tu te mets à pleurer)

« Songbird, bordel.. » ce n’est plus la voix de Micaiah

Dans un sursaut tu te redresses, souffle court et larmes aux yeux. Il fait sombre dans la pièce, mais si le corps à-moitié endormi de l’autre côté du lit est la moindre indication, il doit toujours faire jour. Tu t’essuies les yeux dans un mouvement empressé pendant qu’il ne te regarde pas, se retournant sur le dos pour grommeler qu’il est trop tôt pour ça et que tu es une vraie plaie.

« Désolé. J’ai rêvé de toi, c’était une horreur. » plaisantes-tu avec un sourire en coin
« Sale. J’ai pas besoin des détails. » réplique Nicholas avec une grimace, écartant des mèches noires de ses yeux

Tu lâches un rire vide, et il sait que tu mens, mais il ne pose pas de question. Parce qu’il a appris qu’avec toi ça ne menait nulle-part. Il ne connait même pas ton nom: quand il te l’a demandé, tu lui as répondu que ça n’avait pas d’importance. Qu’il n’avait qu’à t’en donner un.

(après tout, ta famille t’a rejeté pour ce que tu es)
(tu ne déshonoreras pas leur nom en le trimbalant avec toi)

Alors il t’appelle Songbird, à cause de votre première conversation. Le souvenir t’arrache une sorte de rictus: honnêtement, c’est pas aussi poétique que ça sonne. Il a failli te tuer en te trouvant dans son grenier ce matin d'automne, parce qu’on est jamais content de trouver un squatteur chez soi. La façon dont son Kaiminus claquait des mâchoires en dit long sur ce à quoi tu as échappé de justesse. Tu n’étais à Aros que depuis un mois, et tu avais trouvé cet endroit la semaine précédente. La fenêtre était facile à ouvrir, facile à refermer, et assez hermétique pour protéger des vents extérieurs, alors ça avait été logique d’y élire domicile.

tu chantais quand il t’a trouvé
parce que tu pensais qu’il était sorti

(une chanson douce et enjouée)
(une des préférées de Micaiah)

Nicholas n’est pas quelqu’un d’indulgent, tu as eu de la chance qu’il trop fatigué pour être violent ce matin. Il t’a dit de ne jamais revenir, au départ, mais tu as réussi à le convaincre que tu pourrais être utile. Tu lui as montré ton premier masque, celui qui ressemble à un visage de Noarfang à plumes blanches, et il a éclaté de rire, dissipant toute la tension dans l’air. Il t’avait déjà croisé quand tu faisais les poches des passants les moins attentifs, dissimulé par les ombres de la nuit et un manteau noir. Il t’avait déjà vu fuir sur les toits, les exclamations contrariées des gardes royaux dans ton dos, donnant l’impression de voler.

il t’a appris qu’ils t'appelaient Céleste
et qu’il voyait à quoi tu pourrais lui servir, maintenant

quand tu ne lui as pas dit ton vrai nom, il a choisi Songbird
parce que tu avais tout l’air d’un oiseau chanteur, ce matin

Il t’a appris qu’il était apothicaire, et que si tu voulais rester tu serais son coursier. Parce qu’il ne livrait pas toujours des remèdes, et il n’avait pas envie d’être directement associé à ça. La semaine suivante il t’a offert de dormir dans la même pièce que lui. Ca serait sans doute plus confortable que le grenier où passaient parfois des courants d’air. Tu ne t’es pas fait prier.

« Tais-toi. » grommelle Nicholas, le visage enfoui dans son oreiller
« Je n'ai rien dit. » tu penches la tête sur le côté, un sourire jouant sur tes lèvres
« Tu penses trop fort. » ah, peut être qu’il n’a pas tort

Tu ris, et ça sonne un peu plus vrai que tout à l’heure. L’après-midi touche à sa fin, il ne devrait pas tarder à faire nuit, mais tu savoures encore quelques minutes au lit. Ca fait maintenant plus d’un an que tu vis sous le toit de Nicholas et le mois dernier il a décidé de te faire assez confiance pour que vous partagiez le même lit. Parce qu’apparemment tu n’es pas un voleur trop douteux, et que l’hiver d’Aros est rude cette année: hors de question que tu tombes malade parce que tu dors trop près du sol. Après, ce serait à lui de te soigner.

ses excuses te son passées au dessus de la tête
mais une fois de plus, tu n’as pas refusé

« Chante-moi quelque-chose, ça sera plus agréable. » il repousse les couvertures jusqu’à sa taille, encore embrumé de sommeil

Tu te racles la gorge le temps de réfléchir. Ca fait longtemps que tu chantes, encore un passe-temps que ton père n’a jamais approuvé. Parce qu’il n’y a pas de temps à perdre avec de telles futilités, parait-il. Habitué à n’avoir pour audience que le ciel étoilé ou Micaiah, tu t’es étouffé avec ton thé la première fois que Nicholas t'en a fait la requête. Il aime la musique, apparemment, pour une raison que tu ne lui as pas demandé de spécifier.

« Eh bien, Songbird ? »  il s’impatiente dans un bâillement

Dans un sourire, tu entames une comptine Kalosienne à l’air mélancolique, l’une des premières que tu aies apprises. Il allume une bougie pendant que tu chantes à propos d’un Passerouge sur la plus haute tranche d’un chêne, et d’une maîtresse perdue pour un bouquet de roses. Tu n’as jamais demandé s’il comprenait les paroles, mais peut-être que tu préfères ne pas savoir.

ça t’évite d’être embarrassé au moment du refrain
quand ta voix se brise un peu sur la dernière syllabe

« Il y a longtemps que je t’aime, jamais je ne t’oublierai. » tu quittes le lit à ton tour, frissonnant dans l’air glacé

Tu t’habille en terminant la chanson, et il s’étire une dernière fois avant de se diriger vers le garde-manger pour préparer de quoi vous nourrir. Récemment, la Dragonne a choisi un nouveau Gardien pour Aros, suite au décès du précédent. Il parait que c’est une enfant, mais puisqu’il lui est interdit de quitter la tour, tu n’as pas pu t’en assurer. A vrai dire, jusqu’à cette histoire de semaine de deuil, tu ne savais pas trop comment était régie la contrée. C’est Nicholas qui a dû t’expliquer, moyennant quelques soupirs excédés, mais maintenant tu penses un peu mieux savoir ce qui se passe.

Repas terminé, tu fais la vaisselle pendant que Nicholas descend à sa boutique pour s’apprêter à ouvrir. C’est bientôt l’heure de partir pour toi aussi, le masque noir et blanc offert par l’apothicaire te regarde depuis l’étagère qu’il a dégagée pour tes maigres possessions.

« Alors, pour quoi as tu besoin de moi cette nuit ? » demandes-tu en descendant l’escalier, une note enjouée dans la voix

Ce soir-là tu cèdes à la curiosité, et lorsque le jour se lève, tu fais un crochet par le phare avant de retourner vers les ruelles ombrages. Masque dissimulé dans la poche de ton manteau noir et capuche descendue sur tes épaules, tu es un citoyen lambda lorsque tu accèdes à la bibliothèque. Si tu aimerais bien t’instruire, tu n’es pas là pour ça, Céleste: lire la langue d'Hastérion n’est pas encore à ta portée. Non, au lieu de ça, tu cherches une fenêtre à partir de laquelle escalader l’extérieur du phare. Si la Gardienne ne peut pas sortir, tu peux bien passer jeter un oeil pas vrai ?

Le soleil s’est levé depuis un moment lorsque tu quittes le phare et retournes enfin vers les ruelles ombrages. Tes jambes sont fatiguées, manquant de te faire rater plusieurs réceptions pendant que tu cours sur les toits, mais ton esprit a rarement été aussi éveillé. La Gardienne s’appelle Meg et c’est une tête blonde globalement adorable, tu repasseras sans doute la voir pour qu’elle ne soit pas trop seule, en haut de sa tour.

Si ton projet originel était de quitter cette ville froide vivant de nuit dès que tu te considérerais assez compétent pour prendre la route tout seul, un peu plus d’un mois à passer voir Meg t’a fait revoir tes plans. La Gardienne ne semble toujours pas motivée à quitter sa chambre, et c’est difficile de l’admettre mais tu t’es un peu attaché à elle. Un peu plus que prévu.

tu passes la voir un jour sur deux
(tu dirais même que vous êtes amis)

Elle t’apprend à lire la langue d’Hastérion avec ses livres de contes, et si c’est du langage assez simple, ça a jusque là été plus efficace que d’essayer de demander assistance aux scribes. (si les regards pouvaient tuer, ce blond t’aurait sans doute assassiné) En échange, tu lui amène de petits cadeaux, souvent volés mais pas toujours. Tu lui racontes des histoires d’Aros et d’Illumis, tu lui chantes les mêmes chansons qu’à Nicholas, en modifiant les mots les plus crus par égard pour son jeune âge.

(elle ne comprend pas les paroles)
(mais on est jamais trop prudent)

tu lui as fait promettre de ne pas parler de toi
(tout comme tu ne parles pas d’elle)

ce serait dommage qu’on mette fin à tout ça
(ce serait dommage qu’on te coupe les ailes)