Terre d'Accueil | Vanya

Les jours serrés dans la voiture n'étaient en rien égayés par les nuits passées dans les auberges de passe même si les plus acceptable avaient été sélectionnées sur leur itinéraire. Si l'entente semblait cordial, il fallait avouer que l'héritier de Gardefier jouait parfois de fausses notes sans même s'entendre. Seul son agacement des routes comptait et s'il pouvait compatir de la lassitude qui pouvait étreindre sa promise, il avait probablement du mal à lui laisser de la place pour s'exprimer. Mais c'est qu'elle était discrète la veuve de Sinnoh... Pour autant, tout n'était pas à jeter et si Rex savait se montrer grognon, il avait pris à cœur les enseignements qu'il avait promis à sa fiancée. Ainsi sur la route, il n'avait pas rechigné à l'approcher des bêtes et à jouer d'encouragements pour l'inviter à se montrer plus confiante. Il alla même demander à Rob – le garde qui avait été chargé de la protection de la future dame de Gardefier, le même qui lui avait rapporté Neptune – de rapprocher son Arcanin qui semblait bien plus attirer la confiance de Vanya.
Ainsi, jouant parfois d'orgueil sur ses propres prouesses, il laissait apparaître une réelle passion et affection pour les bêtes. Un sourire sincère accueillait ses propres paroles alors qu'il invitait parfois sa promise à jouer de plus d'initiative. Il fallait amadouer les Galopas si elle voulait monter sans crainte d'un retour de flammes, c'était ce qu'il lui avait souffler en lui glissant une pomme dans les mains et en lui indiquant comment nourrir les chevaux. La main bien à plat, tendue devant le museau des bêtes.
Ainsi passèrent-ils la plupart des pauses qu'ils firent sur le chemin, oscillant entre une envie débordante de courir et de se dégourdir les jambes – Pluton ne s'en privait pas, le veinard – et une réelle assiduité. Plus sérieux que ses airs pouvaient le laisser penser, ce fut maladroitement qu'il tenta à plusieurs reprises de rassurer sa promise lorsqu'elle semblait douter de ses approches, lui indiquant – parfois de manière intempestive – comment se positionner pour ne pas effrayer l'animal ou comment l'aborder. Parfois on ne lui demandait pas son avis mais il n'en avait cure.

Lorsqu'enfin ils abordèrent les terres de Scémède, ils avaient bien progressé dans ce début d'apprentissage et l'humeur de l'héritier de Gardefier s'était faite peu à peu plus radieuse. Il reconnaissait ses terres natales, il reconnaissait ses odeurs et ses paysages. Son pied avait cessé de tressauter en quelques jours et un sourire juvénile peinait à quitter son expression lorsqu'il regardait par la fenêtre. Il n'avait alors eu de cesse de parler de Scémède à la dame de Sinnoh, ne tarissant pas d'éloges sur ses bienfaits et ses produits locaux. Même les habitants – humbles ou pas – avaient eu le droit à leurs compliments.
L'humeur au beau fixe lorsqu'il reconnut les routes et était assuré qu'ils n'étaient plus loin du domaine de Gardefier, il déboula presque de la voiture lorsque la pause fut décidée. Pluton n'avait pas hésité à le précéder mais même s'il brûlait d'envie de s'étirer, il se tint tout de même sur le côté de la porte pour aider sa promise à descendre sans embûche. Après une profonde inspiration, il laissa aller :

« Sentez-vous cet air, ma Dame ? C'est la bonne odeur des riches campagnes de Scémède ! » en faisait-il trop ? Peut être. Mais il était sincèrement heureux de retrouver son territoire. « Nous voilà bientôt arrivés, nous ne tarderons plus à apercevoir les murs votre nouvelle demeure. » Impatient ? Un peu. Il s'écarta de l'attelage pour étirer ses bras vers le ciel non sans siffler Pluton qui s'éloignait un peu trop à son goût. Le chien était alors revenu, une branche entre les crocs et la déposa aux pieds de son maître avant de sautiller, excité. Rex n'avait pas attendu longtemps avant de récupérer le bâton et de le lancer pour sa bête – pas trop loin non plus –.
« Êtes vous prête pour une nouvelle séance ? » lui demanda-t-il alors en se frottant les mains, l'air guilleret le ton léger. « Si vous vous sentez en confiance, nous pourrions peut être même monter. » la déclaration sonnait plus comme une possibilité que comme un réel plan, mais il avait l'air suffisamment enjoué pour que cela sonne également comme une invitation.

Le retour a Scémède avait rendu Rex affable et de bonne humeur. Les conseils qu'il prodigua à sa future épouse était – à son sens – remarquablement précis et utiles.
Cependant, et contre toute attente, le sire aux chiens préféra jouer de prudence lorsque la question de monter les Galopas s'éleva. Les bêtes avaient été dressé pour ne pas craindre les humains qui les chevauchaient, mais elles restaient des monstres de feu. Si bien elles n'étaient pas capable des brûlures qui ne cicatriseraient jamais – à l'instar des morsures d'un Démolosse –, Rex n'avait aucune urgence de voir les effets d'une brûlure de Galopa sur la peau blanche de la dame de Blancherive.

Alors, malgré son envie de rentrer au Domaine au plus vite, après la pause, ils remontèrent tous dans la calèche. Et si son humeur était toujours relativement au beau fixe, un soupir ne manque d'échapper de ses lèvres en jetant un regard vers l'extérieur.
S'il avait été seul ou en meilleur compagnie, il aurait pu enfourcher un Galopa, Pluton sous le bras, et rentrer en quelques minutes chez lui. Au lieu de cela, il devait patienter et subir une route qui se faisait exécrablement longue surtout vers la fin. Il tenta tout de même de se consoler à l'idée qu'aujourd'hui serait le dernier jour du voyage.

Certes, sa vie ne reprendrait pas un cours normal, les préparatifs du mariage étaient bien plus proches qu'il ne l'aurait souhaité, mais au moins, il serait chez lui. Et son esprit simple avait tendance à se concentrer sur ce qu'il lui faisait plaisir plutôt que sur ce qui pouvait l'angoisser.

Après tout, il n'échapperait pas à cette union.